<English: Click here><Japanese: Click here>
Bonjour,
Je m’appelle Janelle, j’ai 21 ans, je suis française et mon plus grand rêve est de devenir metteuse en scène.
Je suis actuellement en 1ère année de master de théâtre à la Sorbonne Nouvelle à Paris. Au cours de mes recherches pendant ma licence, je me suis intéressée aux marionnettes et aux dialogues entre les corps vivants et inanimés. Puis, j’ai commencé à m’intéresser au corps de l’acteur-marionnette, c’est-à-dire un acteur qui ne communique pas ses émotions en les affichant sur son visage, mais plutôt un acteur vide, désincarné, qui communique et fait naître des émotions par le biais de ses gestes et de la posture de son corps. En effet, je pense que moins un acteur est émotif, plus on peut projeter son imagination sur lui.
En France, la plupart des acteurs apprennent à jouer avec leurs visages, mais oublient d’utiliser leur corps. Alors que dans le théâtre japonais, qu’il soit traditionnel ou contemporain, le corps de l’acteur est central et n’est pas considéré comme ayant une valeur inférieure par rapport au texte. C’est ainsi que j’ai commencé à m’intéresser au travail de Satoshi Miyagi et des acteurs du SPAC. Mon mémoire porte sur « l’acteur-marionnette dans l’esthétique théâtrale de Satoshi Miyagi ». J’essaie donc de comprendre comment les acteurs du SPAC arrivent à devenir des marionnettes, comment atteindre une telle précision du geste, comment construire des images avec le corps.
J’ai lu beaucoup de livres, d’articles et d’interviews sur le travail de Miyagi en France, mais je voulais voir de mes propres yeux le processus de création d’une pièce au SPAC. Comment les acteurs travaillent-ils et comment Satoshi Miyagi les dirige-t-il ? Je voulais aussi entendre le témoignage des acteurs sur leur technique de jeu et ce qu’ils ressentent sur scène, car je pense que cela peut être très différent de ce que peut voir le metteur en scène. Alors, je suis partie au Japon pour faire un stage au sein du SPAC.
Même si j’avais déjà fait plusieurs stages auparavant, c’est la première fois que je travaille à l’étranger et que je reste aussi longtemps. Même si la culture japonaise me passionne, j’étais terrorisée à l’idée de faire des erreurs (en raison de mes différences culturelles) et de ne pas réussir à m’intégrer (car mon japonais est limité et la plupart des acteurs ne sont pas à l’aise avec l’anglais). Mais toute l’équipe est d’une incroyable gentillesse, et même si la communication est difficile avec certains, ils utilisent parfois les quelques mots de français qu’ils connaissent pour me parler, ce qui me touche profondément. J’ai même donné des petits cours de français à certains acteurs pendant les pauses.
Heureusement, dans le monde du théâtre, il existe d’autres moyens de communication que la parole. Par exemple, en utilisant notre corps ou en faisant de la musique. Justement, une des premières étapes de la création du spectacle est la recherche musicale. Nous avons tous ensemble joué des instruments de musique en improvisant avec des djembés, des maracas et des morceaux de bambous. C’était la première fois que j’utilisais ces instruments, mais je n’étais pas la seule, ce qui a rendu cet instant beaucoup plus amusant.
C’était vraiment un moment de partage unique où nous avons pu dialoguer juste avec les rythmes. Grâce à cela, j’ai pu indirectement apprendre des choses sur les personnes avec qui je n’avais jamais parlé jusque-là. Puis, nous avons dansé sur les rythmes des djembés. Et je me suis aperçue qu’en dansant, les acteurs qui n’étaient jamais venus me voir, sans doute par peur de devoir utiliser de l’anglais, m’ont rejoint et ont dansé avec moi. Ce sont tous des personnes formidables, passionnées par le théâtre et incroyablement drôles. Je n’ai jamais autant ri pendant la création d’un spectacle.
Au SPAC, il y a une grande part de recherche artistique avant de créer un spectacle. Alors, en début d’après-midi, nous regardons ensemble des documentaires et des captations de spectacles pour chercher de l’inspiration. Nous avons aussi fait un atelier marionnette pour faire des recherches sur la partie du spectacle qui sera en théâtre d’ombre.
En France, dans la plupart des cas, les acteurs se contentent d’apprendre le texte et de suivre les ordres du metteur en scène. C’est le metteur en scène qui fait les recherches, mais pas vraiment les acteurs (bien sûr, cela dépend des compagnies). Les acteurs du SPAC ressemblent à une classe étudiante qui ne cesse d’apprendre et d’expérimenter de nouvelles choses, et je pense que c’est cela qui fait leur force et qui garantit la grande qualité esthétique de leurs pièces.
Les marionnettes étant une de mes spécialités, j’ai proposé des idées pendant cet atelier. En effet, je pense que le but d’un stage n’est pas seulement de recevoir des enseignements et de récolter des informations, mais aussi de partager un peu de mes connaissances pour les aider dans leur travail.
J’ai donc essayé de leur expliquer le principe du « théâtre d’objet ». Il s’agit d’une forme particulière de marionnette où l’on remplace une marionnette de physionomie humaine par un objet (une tasse, un stylo, un balai…) dont la fonction évoque la personnalité ou la caractéristique d’un personnage. Par exemple, j’avais proposé, pour représenter le dieu du vent, d’utiliser un ventilateur. Ce ventilateur pourrait être placé face à un autre personnage dont les cheveux pourraient flotter dans le vent. Je pense qu’ils n’ont pas compris que je voulais utiliser le ventilateur en lui-même pour faire une marionnette, mais ils ont tout de même gardé l’idée d’utiliser du vent avec un ventilateur et ont construit des marionnettes avec des morceaux de tissu ou de plastique léger qui flottent dans l’air.
Ça m’a fait très plaisir qu’ils écoutent et considèrent mes propositions. J’ai pu aussi donner quelques conseils et apporter mon aide pour construire les marionnettes. Ils ont tous beaucoup d’imagination et ont proposé des choses très intéressantes qui produisaient de très belles images.
(※1)Pour plus d’informations voir la définition dans World Encyclopedia of Puppetry arts par l’Union International de la Marionnette https://wepa.unima.org/fr/theatre-dobjets/
Jusqu’à présent, travailler avec le SPAC et partager ma passion du théâtre avec eux est un pur bonheur. Je prends plaisir à observer, aider et échanger avec tout le monde. Je ne dis pas ça pour faire plaisir à Miyagi ou au staff du SPAC, mais parce que je le pense sincèrement. Je suis reconnaissante au SPAC de m’avoir laissé embarquer à bord de leur navire. J’ai hâte de voir ce que la suite nous réserve.
Janelle RIABI
Ramayana
https://festival-shizuoka.jp/en/program/ramayana/
Dates: 29 avril à 18h45, 2 mai à 18h45, 3 mai à 18h45, 4 mai à 18h45, 5 mai à 18h45, 6 mai à 18h45
Lieu: Momijiyama Garden Square, Sumpu Castle Park
Durée de l’événement: Environ 90 minutes
Langue: en japonais avec surtitres en anglais : En japonais avec surtitres en anglais
Siège: places réservées
Œuvre originale: Valmiki
Structure et mise en scène: MIYAGI Satoshi